L'ancien juge John Gomery n’est plus

L'ancien juge John Gomery, qui a présidé la commission d’enquête sur le « scandale des commandites », est mort mardi à l’âge de 88 ans.

Sa fille Elizabeth Gomery a précisé sur les réseaux sociaux que son père s’était éteint dans la nuit. « Il était un géant, un homme extraordinaire et un superbe père, et mon coeur et tout mon corps souffrent maintenant qu'il n'est plus là », a-t-elle écrit

John Gomery s'est fait connaître à la grandeur du Canada lorsqu'il a été choisi pour mener la Commission d'enquête sur le programme de commandites et les activités publicitaires. Les audiences de cette commission très médiatisée ont commencé le 7 septembre 2004.

Elles devaient faire la lumière sur l'usage abusif de fonds publics pour financer des opérations de relations publiques mises en place par le gouvernement de Jean Chrétien dans la foulée du référendum de 1995 afin de faire la promotion du fédéralisme et du gouvernement canadien au Québec.

L’imposante commission s'est étendue sur 10 mois, 172 témoins ont défilé et certaines des révélations ont plongé le pays dans l’émoi.

Le juge Gomery a déposé le premier rapport de la commission le 1er novembre 2005. Le volumineux document fait porter une partie de la responsabilité à l'ancien premier ministre Jean Chrétien et à son entourage. Il met cependant hors de cause son successeur, Paul Martin.

C’était la dernière mission professionnelle pour ce juge né en 1932 dans une famille anglophone de l’ouest de Montréal.

En entrevue à Radio-Canada en 2018, l’ancien juge a confié qu’il était fier du travail accompli à la barre cette commission d’enquête.

Je pense vraiment que la démocratie est meilleure au Canada. Nous avons permis d’établir les balises de ce qui est permis ou non pour les politiciens. Nous avons sensibilisé la classe politique aux dérives dont ils doivent se méfier. Le gouvernement est définitivement plus propre qu’avant, a-t-il dit.

Un grand impact

Les travaux de M. Gomery ont eu beaucoup d’impact, selon Daniel Leblanc, qui était reporter du Globe and Mail lorsqu’il a mis au jour le scandale des commandites.

Je pense qu’il a fait peur à beaucoup de politiciens.

Un des premiers projets de loi des conservateurs qui ont succédé aux libéraux visait à faire le ménage pour assainir la politique, a ajouté M. Leblanc.

Il a également rappelé l’épisode des balles de golf, revenu hanter le juge Gomery.

Il [le juge Gomery] avait convoqué trois journalistes pour parler de lui et de la commission […] il avait critiqué les balles de golf avec la signature de Jean Chrétien qui avaient été achetées avec l’argent des commandites. Il n’aurait pas dû faire ça. Cela est revenu le hanter par la suite.

Lors de son témoignage devant la commission d’enquête, l'ancien premier ministre a répliqué en exhibant une balle de golf au nom d'Ogilvy Renaud, firme d'avocats pour laquelle travaillaient le procureur de la commission, Bernard Roy, l'ancien premier ministre Brian Mulroney et la fille du juge Gomery, Sally.

Admis au Barreau du Québec en 1957, il a commencé sa carrière au cabinet Fasken, Martineau & Dumoulin. Ses champs de spécialisation incluaient le droit de la famille, les litiges commerciaux et la faillite. Il a été nommé juge à la Cour supérieure du Québec en 1982.

Au fil de sa carrière, il a été président de la Commission du droit d'auteur du Canada, du Comité général des juges de la Cour supérieure du Québec et du Comité du droit de la famille.

Il a aussi présidé le Conseil de presse du Québec (CPQ).

Après une vie professionnelle bien remplie, l’ancien juge s’est retiré dans une ferme à Havelock, près d'Hemmingford en Montérégie, troquant la robe du magistrat contre les bottes d’agriculteur.

Il a aussi planté 1200 pins. Avec sa femme, il aimait se promener dans la forêt née de ces arbres.

Avec les informations de La Presse canadienne