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Utilisation du « mot en n » : les élus divisés sur le sort de la professeure d'Ottawa

La professeure tentait d'illustrer comment des groupes marginalisés se réapproprient des insultes.

Portrait de Jagmeet Singh.

Jagmeet Singh estime que la professeure n'aurait jamais dû prononcer le mot. Des élus québécois jugent qu'elle peut le faire dans un contexte académique.

Photo : La Presse canadienne / Adrian Wyld

Radio-Canada

Plusieurs élus fédéraux et provinciaux ont été appelés à réagir mardi devant la polémique créée par l'utilisation du « mot en n » par une professeure de l'Université d'Ottawa pour illustrer la façon dont des groupes marginalisés récupèrent des termes péjoratifs. Comportement « inacceptable » ou « dérapage important » de l'UdO, qui a suspendu son employée? La classe politique est divisée.

Une controverse importante secoue l'Université d'Ottawa depuis la fin du mois de septembre, soit après que la professeure Verushka Lieutenant-Duval eut été suspendue pour avoir prononcé le « mot en n » dans un cours afin d'illustrer la façon dont des groupes marginalisés récupèrent des termes péjoratifs.

La polémique s'est ensuite poursuivie sur les médias sociaux, où des professeurs ayant appuyé publiquement leur collègue ont été vivement critiqués. Certains messages ont même incité à la cyberintimidation de professeurs.

Verushka Lieutenant-Duval a depuis réintégré ses fonctions. Le recteur de l'université, Jacques Frémont, a toutefois défendu la décision de l'institution.

« Complètement inacceptable », dit Jagmeet Singh

Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a été appelé à réagir à cette polémique mardi à l'occasion d'un point de presse sur la possibilité d'un déclenchement d'élections à Ottawa.

L'élu fédéral a d'emblée pris la défense des étudiants racisés qui pourraient se sentir heurtés par l'utilisation du terme, même en contexte académique. C’est tellement important que nos milieux d’éducation soient sécuritaires pour tout le monde, qu'on n’y ait aucun exemple de racisme systémique, a-t-il soutenu.

Pour M. Singh, il n'y a ainsi pas vraiment lieu de débattre sur l'utilisation ou non de ce mot, peu importe le contexte. C’est tellement clair qu’une professeure ne doit pas utiliser un mot comme ça, qui est plein de racisme historique, qui peut blesser les autres.

C’est tellement clair, a-t-il répété.

Tout le monde est d’accord, je crois, c’est complètement inacceptable ce qu’elle a fait.

Une citation de Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti démocratique

Or, à Québec, la classe politique s'est plutôt entendue sur la position contraire mardi, mettant en garde contre une dérive de censure dans les milieux universitaires.

« Gros dérapage », dit Legault

Lors de sa conférence de presse sur l'état de la pandémie au Québec, le premier ministre François Legault a critiqué l’Université d’Ottawa et son recteur, dénonçant un dérapage important. Selon lui, aucun mot ne devrait être interdit. Il parle d'une exagération du côté de la rectitude.

Il faut toujours regarder le contexte dans lequel les mots sont utilisés, a-t-il argué.

Les universités doivent être des endroits où on peut faire des débats, où la liberté d’expression est importante. Je pense que – que ce soit à Concordia ou que ce soit ce qui se passe actuellement à Ottawa – c’est un dérapage important, qui est inquiétant.

Le premier ministre Legault en conférence de presse.

Le premier ministre François Legault

Photo : La Presse canadienne / Ryan Remiorz

C’est comme si on avait une espèce de police de la censure. Il faut vraiment arrêter ça.

Une citation de François Legault, premier ministre du Québec

Le ministre de la Famille, Mathieu Lacombe – responsable de la région de l'Outaouais et diplômé de l'Université d'Ottawa –, s'est rangé du côté de son premier ministre, affirmant ajouter sa voix à ceux qui défendent la liberté académique.

Même son de cloche du côté de la vice-première ministre du Québec, Geneviève Guilbault. Le terme en tant que tel est inacceptable s’il est utilisé dans la société communément, le débat n’est pas là. C’est très important de faire la nuance, a-t-elle d'abord indiqué en point de presse.

Le débat est vraiment sur la liberté intellectuelle, la liberté académique, la liberté dans un contexte où on dispense des formations qui font appel à des notions historiques, a ajouté Mme Guilbault.

Unisson à Québec

Les partis d'opposition ont joint leurs voix à celle du gouvernement, dans un rare élan d'unanimité à l'Assemblée nationale, pour dénoncer la censure de mots dans les universités.

Dominique Anglade, cheffe du Parti libéral du Québec et première femme noire à occuper le poste de cheffe de l’opposition officielle, a réitéré sa position selon laquelle on doit pouvoir nommer les choses, on doit pouvoir enseigner l'histoire à nos enfants.

La co-porte-parole de Québec solidaire, Manon Massé, a pour sa part affirmé qu'on ne pouvait s’empêcher de réfléchir collectivement.

Le nouveau chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, s'est aussi mis de la partie, déclarant que si on veut apprendre de nos erreurs en Occident, on ne peut pas brûler nos livres parce qu’ils sont inconfortables.

Protéger la liberté académique?

Selon François Legault, la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann, examine déjà la possibilité d’adopter un projet de loi pour protéger la liberté universitaire.

En entrevue à En direct avec Patrice Roy, la ministre McCann s’est d'ailleurs dite très, très préoccupée par la situation. Il faut protéger la liberté académique dans nos universités, tout en étant sensibles, évidemment, aux étudiants qui sont interpellés par des mots, des expressions, des situations, a-t-elle soutenu.

Il faut ouvrir un dialogue entre professeurs et étudiants. [...] Il faut aussi soutenir nos professeurs, avoir des mécanismes quand il y a une plainte, une insatisfaction comme celle-là.

On va s’assurer qu’il y ait un processus qui donne une marche à suivre pour répondre à de telles plaintes. Et ça arrivera dans les meilleurs délais parce que c’est une question qui se pose maintenant dans nos universités, a-t-elle promis.

Selon elle, le chantier sur l’université du futur, entamé l’an dernier et qui doit se poursuivre en novembre, tombe à point puisque l’un des thèmes du groupe de travail est justement la liberté académique.

Entrevue avec Balarama Holness, fondateur de « Montréal en action »

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